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Lights will guide you home

Parfois tu ris et tu te dis que ça peut te sauver. Il y a les livres, les auteurs étudiés et les philosophies, tes cahiers remplis de notes et toutes ces feuilles broyées noyées de ton écriture de plus en plus illisible, de plus en plus fuyante. Parfois tu écris et tu te dis que ça te retient à une quelconque surface. Les projets se tissent, un peu sans toi mais c'est bien ta main qui signe tous ces papiers et tu te dis que tu as une vie devant toi. Tu t'allonges sur les pierres plates aux bords des eaux et tu écoute leurs voix comme d'un autre monde, tu marches au soleil tu fermes les paupières tu serres son bras, tu l'écoutes parler ça irrigue un peu l'aride des pensées, tu te dis aussi que c'est étrange et que ça a quelque chose de ravivant que d'entrer là et de dire bonjour, j'aimerais un billet pour l'Australie. Mais tu pourrais aussi bien être en train de dire que bonjour, je voudrais un ticket de bus pour la ligne 7 que ça ne changerait rien, et tout ça glisse de tout ton long et ça ne te fait rien. Ce n'est plus vraiment toi c'est l'exil depuis qu'on t'a rouverte à vif parce que tu t'es trahie, et tu te dis seulement dans un terne écho que tout cela finira bien par revenir, les sensations les euphories et tu restes imperméable. Tu vois la pluie et tu te sens étrangement calme, tu te dis que tu aimerais t'asseoir là et la regarder s'écraser et fumer, une cigarette après l'autre. Cigarette pluie cigarette, pluie, cigarette. Pluie. Cigarette... P l u i e . Infiniment. Voilà parfois tu ris et tu es comme cette place fourmillante de vie de cris, elle aussi a eu mal sans doute, l'histoire n'est clémente ni avec les hommes ni avec les villes et pourtant tous ces après-midis on y achète des glaces on y court après les bus on s'y donne rendez-vous. Voilà tu ris et même si tu luttes tu ne prononces plus son nom, et même si tu trembles tu fais comme si de rien. Quand tu ris c'est simple, c'est neuf, c'est beau.
Parfois un détail ricane qu'on t'a dévastée de l'intérieur, et tu as cessé de te retenir de fondre en larmes et ça revient presque chaque soir. Ca en devient bien trop familier mais ça te prend là et tu attends que ça te vide, en te disant que ce qui te tenait debout il y a quelques heures ne sont finalement pas des choses à la hauteur desquelles tu sais rester. Et les gens tiennent toujours de mêmes paroles, et ça ne change rien, jamais, mais tu hoches la tête, il n'y a rien d'autre à dire. Parfois tu mets en marche la musique parfois ça t'apaise parfois ça t'achève. Chaque matin tu lisses ton reflet du mieux que tu peux, tu recommences.

Par aubes, le Mercredi 30 Avril 2008, 16:56.

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Commentaires

adagio

adagio

30-04-08 à 17:17

Oui, rire peut sauver en effet :)
Car quand on rit on oublie tout le reste, c'est juste l'instant présent dans toute son intensité explosive qui compte.
(un peu comme éternuer, mais dans ce cas c'est trop rapide, on n'a pas le temps de vraiment savourer !!)

Ton texte me fait l'effet d'une rivière qui s'écoule lentement, mais sûrement, d'un nuage qui avance  doucement, mais  majestueusement.
Cela donne envie de se laisser envelopper par de douces volutes, le soir, à la nuit tombée, dans le murmure éloquent de la nature environnante.
Comme quoi, même si tu es dévastée de l'intérieur, tu as su tout de même garder un oeil attentionné et un esprit capable d'exprimer ce qui entoure ta peine, alors pour ça aussi tu peux recommencer : l'essentiel est de ne pas s'arrêter :)
(ou alors, juste un moment, pour mieux repartir ensuite et continuer d'avancer)


Re:

aubes

aubes

05-05-08 à 21:39

(Pourquoi donc tant de personnes adorent éternuer et vous en veulent quand vous les en empêchez :).
(Je voudrais savoir rire plus souvent).
Ne surtout pas s'arrêter, ne pas penser qu'on pourrait perdre l'équilibre. Oui. Tu sembles avoir un caractère très positif, ça aussi c'est ravivant. Même si parfois, de telles personnalités me rappellent trop ma monochromie pour ne pas m'y faire sombrer un peu plus. 

(Et puis, les détails mis à part, tu as posté ce commentaire à 17h17 et chaque fois que c'est le cas de quelqu'un ici je ne peux m'empêcher de le relever, cette minute est pour moi un fil au bord du temps et je ne saurai même pas dire pourquoi.)

Merci,  pour tous ces mots.


Re:

adagio

adagio

05-05-08 à 22:24

Tu n'es pas du tout monochrome tu sais ? Et je m'en voudrais terriblement si mes propos te laissaient penser que tu l'étais. J'aime les couleurs de tes mots, la façon dont tu les assembles avec ta propre palette plus riche que tu ne le perçois toi-même.
J'ai en effet un caractère positif, car j'ai choisi de sourire à la vie plutôt que de pleurer avec elle. Mais cela ne s'est pas fait en un jour :) et cela ne retire rien aux difficultés que je peux rencontrer moi aussi. J'ai juste choisi de ne pas les écrire. Par pudeur principalement.
Mais vois-tu, j'aime pourtant partager avec d'autres ce que moi-même ai pu éprouver à un moment ou un autre, ou bien découvrir d'autres façons d'exprimer ses parcours de vie.
C'est toujours enrichissant les échanges, et l'écriture ici en permet de très beaux.

(Pour la minute en question, c'est le 17 ou bien la symétrie dans l'horaire que tu as relevé ? en tout cas, peu importe que tu saches pourquoi ou non, mais j'ai beaucoup aimé ta phrase : "cette minute est pour moi un fil au bord du temps". J'aime cette image, mais moi non plus je ne sais pas très bien pourquoi. Et d'ailleurs, qu'importe ? on peut aimer sans savoir pourquoi)

:)


Re:

aubes

aubes

07-05-08 à 23:11

Ne t'en veux pas, c'est ma faute plus que celle de n'importe qui. Je n'ai qu'à changer de lunettes. :)

J'ai souvent entendu qu'il fallait sourire à la vie, mais cette deuxième partie de ta phrase, plutôt que de pleurer avec elle, est celle qui me convainc.
Et c'est vrai que c'est très enrichissant, ici.

17h17, sans doute les deux. On n'est pas sérieux quand on a 17. Ans. Disait Rimbaud.


passionnee-par-les-reves

passionnee-par-les-reves

01-05-08 à 23:10

Au contraire, ton texte me fait l'effet inverse. D'un quelque chose qui s'enchaîne, s'enchaîne et se déchaîne. Tu ne mets presque aps de virgule, et du coup je lis, je lis sans m'arrêter. D'un coup. D'un coup d'oeil. Et puis forcément il y a ça et une petit cri qui sort à ce moment de
ma lecture. "tu l'écoutes parler ça irrigue un peu l'aride des pensées, tu te dis aussi que c'est étrange et que ça a quelque chose de ravivant que d'entrer là et de dire bonjour, j'aimerais un billet pour l'Australie. Mais tu pourrais aussi bien être en train de dire que bonjour, je voudrais un ticket de bus pour la ligne 7 que ça ne changerait rien". C'est juste. C'est jute l'Australie, ou peut importe où d'ailleurs. c'est juste irrigue/arride. C'est juste que j'aime bien quand tu te dis tu.
C'est juste que ça te va bien et ça nous plait quand tu fais un peu plus long.
Le dernier d'aubes est génial, j'ai dit.


Re:

aubes

aubes

05-05-08 à 21:42

Oui, j'ai pensé à toi en écrivant l'Australie, j'ai pensé que sûrement tu réagirais. A vrai dire, je ne sais pas vraiment pourquoi j'ai fait ça. C'est L. qui me disait il y a quelque temps tu le feras, je suis sûre que tu le feras. Peut-être que ces gens-là sont ceux qui font pencher la balance, quand on n'en a soi-même pas la consistance.

Et c'est juste que ça me touche, encore, ça me fait sourire, même si j'ai aussi eu envie de pleurer, d'émotion peut-être, ou de paradoxe, j'étais loin de penser que ce texte soulèverait ces mots là. Tout simples mais ils portent quelque chose de si positif, et ça ranime quelque chose.


ecilora

ecilora

01-05-08 à 23:49

Même que c'est à moi qu'elle l'a dit que c'était génial!
Et puis, c'est vrai. Je trouve que la deuxième personne, ça fais un effet tout étrange quand on écrit. On se détache de nous à se voir dans le blanc des yeux. Et c'est d'une force. Cà percute de plein fouet et pouf. On se retrouve à devoir reprendre notre souffle parce qu'on a tout dit d'une traite ou presque. Comme si on ne devait pas s'arrêter en écrivant sinon ça gâcherait tout. Le "tu" c'est immédiat quand je l'écris. C'est tout de suite ou jamais. Et puis, tu joues avec les mots et la sonorité... Et ça, j'aime. :)


Re:

aubes

aubes

05-05-08 à 21:44

Le tu soulage quand il prend le relais d'un je qui ne sait plus très bien comment exister. Et c'est vrai, ça fait reprendre un souffle quelque part. Pour mai, il le fallait.

Et puis j'ai dû me relire pour m'arrêter aux jeux de mots et de sonorité. C'est génial quand quelqu'un d'autre les remarque d'abord. (Merci.)

Des bisourires


Re:

ecilora

ecilora

06-05-08 à 13:51

Ce sont ces petits détails là que je préfère lire et écrire. Alors évidemment, je les souligne. Quand j'y pense! :)
(de rien)
Bisourires


Mélie

02-05-08 à 01:34

passer ici entre deux minutes d'accélération, entre un projet et un autre quand les heures de la nuit vont trop vite, passer ici, et c'est comme une suspension, soudain, je suis forcée de m'arrêter, de poser le temps, de murmurer cette note, et de savourer, de m'apercevoir qu'il fait bon ralentir, et qu'il fait bon, si bon, te lire.
prends soin de toi


Re:

aubes

aubes

05-05-08 à 21:48

... Ton commentaire a quelque chose d'apaisant. Et puis c'est peut-être cet enchaînement, suspension, poser, murmurer, savourer, s'apercevoir. Ca me... ça me. C'est si précieux. Merci, vraiment.
Et puis, prends soin de toi, ces quatre mots me touchent. C'est comme quelqu'un qui dit reste quand tu es sur le pas de sa porte, sur le point de partir. Il y a dedans quelque chose d'un peu mélancolique qui fond dans la gorge.


absolution

02-05-08 à 08:44

Des mots toujours aussi précieux et fluides.
C'est vrai que, chaque matin, on recommence. En essayant de faire mieux que la veille, en se forçant à y croire un peu plus -ou pas-, on se tient debout du bout des doigts, et quand on rit, on se tient droite presque toute seule.
Le truc, c'est que, même si on tangue, on reste debout.
Lisse ton reflet, pleure et doute, mais ne tombe pas.
Et prends soin de toi !


Re:

aubes

aubes

05-05-08 à 21:52

Depuis le début je me demande quel sera le jour où j'oserai laisser un mot chez toi, mais j'ai l'impression que ce ne sont jamais les bons, jamais le bon moment.
Les tiens m'en ont d'autant plus agréablement surpris, et ils reflètent si bien, tout ça. Surtout. Surtout rester debout. Et merci pour ces impératifs des dernières lignes. Ils veulent, à mes yeux, tout dire.

Toi aussi, prends soin de toi. Surtout, et même si.