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Patte de mouche

Tension. Tes mains, longues, un peu fines. Tu m'en as tendu une, alors je me suis allongée près de toi. Voilà, comme ça, soudainement, nous étions tout près l'un de l'autre. Je ne t'avais jamais vu d'aussi près et soudain tu étais là. C'était après.

Tu m'attendais, assis par terre contre la façade d'un bâtiment à lire. J'étais en retard évidemment et je suis venue m'asseoir à tes côtés, vite avant que tu ne relèves la tête - pour que soudain je sois là sans que tu ne me voies arriver. Tu fumais évidemment. Je t'ai posé ma question facile, quels plans pour tes vacances, tu m'as parlé de la mer, peut-être alors le coeur frappant j'ai sorti Océan Mer de mon sac. Tu ne connaissais pas. Banalités, nous n'avons parlé que banalité en comparaison avec. Après.

J'ai tressailli lorsque tu as glissé, je vais beaucoup penser à toi alors, puisque je l'aurai tout le temps sur moi. Comme ça l'air de rien, alors que nous cherchions une Fn*c. Je te devais un peu d'argent, tu as voulu un R*mbaud.

De quoi me faisais-tu peur? Evidemment, j'ai trouvé un prétexte pour me défiler un peu, l'air de rien. Un théâtre. Tu me l'as dit ça t'avait déçu. J'irai quand même. Nous nous quitterons dans le métro, à nous regarder étrangement, sans savoir comment faire. Tension. J'espère que tu es forte en au revoir parce que...
Tu me tendras un bloc notes, pour mon adresse. Je l'appuie sur une boîte à journaux, mon coeur cogne un peu et mes mains tremblent et en voulant le cacher je ne peux qu'écrire très mal, encore plus mal que d'habitude.
Je te tends ma joue. Tu me serres d'un peu plus près que d'habitude, d'un peu plus fort, soudain. Je tente de partir vite, alors je me trompe de direction et en plus je me retrouve devant l'escalator montant. Maligne. Tu as vu. Mon trouble?

Moi, maîtriser exactement, tout, ce que je fais? Toi comme un gamin, d'habitude tant d'assurance, et face à moi si décontenancé que tu ne savais plus comment te comporter? Tu m'en diras tant. Tu sais parler, n'est-ce pas. Tu as mis le doigt dessus. Sur cette ambiguité, tu as trouvé quelque chose de palpable entre nous et tu as mis le doigt dessus. En te regardant parler j'ai admis intérieurement que décidément, oui je te trouvais quelque chose.

Il y aura ton message que je lirai trois heures plus tard, qui cognera encore dans ma poitrine, une euphorie, brume agitée sous les côtes. Tu es fou comme j'. Et je n'hésiterai que pour de faux à attraper une rame qui traversera la ville.
Tu arrives à la bouche au moment où j'en sors, au moment où il se met à pleuvoir. Nous partons dans les rues, les pentes de la butte, les contours. Il y a des éclairs. La pluie qui s'arrête et reprend et s'arrête et reprend. Parfois je te sens me regarder, mon profil n'est-ce pas, comme tu le disais, et je souris, en faisant exprès de ne pas tourner la tête, pour que tu aies peut-être l'impression de me voler un instant sans que je le sache. Tu les fumes, les unes après les autres.

Chez toi, tu me tendras la main, allongé sur ton lit, matelas posé sur le soleil. Sur le sol, pardon ça m'a échappé, et soudain tu seras tout près. Soudain tes doigts glissent en dessinant le contour de mes épaules, de mes clavicules, de mes bras. Fragile, c'est le terme que tu utilises. Et soudain je suis là, au creux de ton cou.
"Si je l'embrasse, c'est pour mieux l'étouffer". Je te demande de m'étouffer et tu réponds que tu aurais trop peur de me casser en mille morceaux.

Plus tard tu parleras des fleurs que tu ne saurais offrir fleurs qui ne pourraient être aussi belles que celles imprimées sur ma combinaison. Qui m'habille si bien dis-tu.
Tu sais parler. Et je sais que ce n'est pas pour cette raison que tu profites de le faire. Tu sais parler, c'est tout. Je crois.

Un café noir derrière les volets encore fermés, après si peu de sommeil. Je te sais me suivre des yeux, j'écoute le bruit de mes pas sur l'escalier, je parviens à le faire sautillant, léger, c'est la dernière chose que tu entendras de moi, et moi je t'entends refermer la porte tandis que j'atteins l'étage du dessous.

Par aubes, le Mercredi 6 Juillet 2011, 12:33.

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Commentaires

MangakaDine

MangakaDine

12-07-11 à 14:51

Je me souviens de cette pluie foudroyante, repartie comme elle était venue, en un éclair. Je venais de rater mon train et m'offrir une journée de plus avec l'inconnu des circonstances.

J'aime ces moments un peu deuxième effet kisskool, bis repetita. Tu sais, ce genre de questions. Et si tu pouvais revenir sur la fin, tu la réécrirais comment? Son message, et tu es chez lui. Pour d'autres au revoir.

C'est marrant à quel point tu as ce petit goût à orchestrer tes instants. Les réfléchir, les scénariser, et tiens si je faisais ceci maintenant il penserait surement cela, etc. Un peu comme s'inventer une conversation au téléphone pour échapper à la banalité de l'attente des salutations... ;) Je me demande si tes pensées intérieures, tes divagations, tes sentiments sont aussi arrangés de la sorte.

Bises


Re:

aubes

aubes

13-07-11 à 16:09

J'aime savoir qu'on a partagé les lieux, un court instant, à quelques rues, quelques nuages de pluie torrentielle de distance. Et ces mots qui me fait voir que c'est comme si on avait réécrit, la fin. Je n'y avais même pas songé tu sais.

Ce goût à orchestrer les instants, comme tu dis, je crois qu'il me vient de certains auteurs, certains livres. Ou des livres tout court. J'ai été, et suis encore, fascinée par cette possibilité de décrire avec les mots, jusque dans les moindres détails, ce qui peut se passer dans un esprit, sous une poitrine, en quelques fractions de seconde. Les mots découpent tout cela, alors comme pour mieux marquer ce que je vis, comme pour mieux l'ancrer dans ma peau, j'écris / j'orchestre dans ma tête. Mais en l'occurrence, et comme souvent, la réflexion et la scénarisation, je ne les ai faites qu'en écrivant. Le moment, je crois que je l'ai vécu sans réfléchir.

Ahaha, l'exemple du téléphone prouve bien que je me préoccupe certainement trop, de ce que l'autre perçoit. ;)


passionnee-par-les-reves

passionnee-par-les-reves

13-07-11 à 01:37

Je...

Je te mail. C'est mieux.

C'est, encore une fois, fraichement très bien écrit;


Re:

aubes

aubes

13-07-11 à 16:11

(Attends ton mail avec impatience.)

Mais merci, parce que rien que cette poignée de mots me touche. (Certainement aussi juste parce qu'elle vient de toi.)